• Mirage, de Ranpo Edogawa

    Mirage, d'Edogawa Ranpo

    Recueil de deux nouvelles de genre Thriller, Mirage et Vermine, parues pour la première fois au Japon en 1929, traduites et publiées en France en 2000.

    Edogawa Ranpo, l'un des écrivains fondateurs des genres Thriller et Policier au Japon, a été particulièrement prolifique dans l'écriture de ses oeuvres aux intrigues criminelles, réhaussées de psychologie malsaine et d'érotisme grotesque, entre 1923 et 1939. Une même année peut avoir vu s'écrire sous sa plume plus d'un récit ; notamment 1925 avec cinq textes, dont La Chambre Rouge, La Chaise Humaine et les deux premières aventures de son fameux détective Akechi Kogoro, ainsi que 1929 avec également cinq fictions, dont Mirage et Vermine, traduits et rassemblés dans ce même recueil.

    La première nouvelle raconte l'étrange rencontre vécue par un jeune homme anonyme, s'exprimant à la première du singulier. Le narrateur met sérieusement en doute la réalité de son expérience, survenue après avoir assisté deux heures durant à un fameux mirage de la plage d'Uozu, au bord de la Mer du Japon dans la préfecture de Toyama, résultant de jeux de brume, de lumières et de reflets, auxquels s'ajoutent la nuit de Mars à Juin les lueurs bleues phosphorescentes des calamars lucioles qui s'accouplent par bancs entiers dans cette baie. A bord du train du soir le ramenant à Tokyo, il finit par adresser la parole au seul voyageur avec lui dans le wagon, un homme âgé possédant un oshie - tableau traditionnel japonais matelassé et fait de pure soie - que ce dernier lui propose de regarder de plus près grâce à de vieilles jumelles. Le protagoniste avise alors les détails particulièrement fins, au point qu'il en semble vivant, du couple insolite de l'oeuvre artistique formé par une belle jeune fille en kimono traditionnel et un vieillard quelconque en costume occidental. L'étrange propriétaire du cadre raconte ensuite l'histoire de ces derniers.

    La seconde intrigue, plus longue que la précédente, s'est maintenue quarante-neuvième au Tozai Mystery 100, classement des cent meilleurs romans de genre Policier de l'Orient et de l'Occident, établi par la maison d'édition Bungeishunju - qui décerne également les prestigieux prix littéraires Akutagawa et Naoki - entre 1985 et 2012. Le personnage principal, Masaki Aoki, souffre de misanthropie depuis sa plus tendre enfance, de façon si absolue qu'elle se manifeste physiquement par une profonde introversion, des spasmes et des larmes incontrôlables. A vingt-sept ans, il retrouve son amour d'enfance, Kinoshita Fuyo, désormais actrice célèbre de théâtre. Alors qu'il croit lui inspirer un intérêt sincère et s'enhardit à lui avouer sa propre attirance pour elle, la jeune femme se moque de lui dans une crise de fou rire. Profondément blessé, le jeune homme la suit à son insu, l'épie sur scène jusque dans les chambres d'hôtel où elle rejoint Ikeuchi Kotaro, son amant et ami d'enfance de Masaki ; la colère de son orgueil rabaissé et la souffrance de ses sentiments bafoués, exacerbés par son voyeurisme obstiné comme par la découverte de Fuyo charnelle et vulgaire en privé, lui inspirent une manière à la fois machiavélique et audacieuse de la tuer. 

    L'obsession envers la beauté féminine conserve une même dimension pathétique et une même finalité tragique dans ces deux récits de l'écrivain japonais, bien qu'ils s'opposent dans leurs formes d'écriture et s'appuient sur les profils psychologiques résolument différents des protagonistes masculins. La jeune fille de soie Yaoya Oshichi et l'actrice de théâtre Kinoshita Fuyo sont sublimées, élevées à l'image de la perfection, à travers les lentilles optiques des jumelles pour la première et par la vision idyllique de l'amour naïf pour la seconde, au regard de leurs prétendants qui décident de les posséder à tout prix. Celui de la nouvelle Mirage subit cependant l'ironie du temps à travers son propre corps, certes rétréci de façon à pouvoir se glisser dans l'oshie, mais demeurant néanmoins mortel et vieillissant aux côtés de l'immuable Yaoya. Masaki Aoki de la nouvelle Vermine sombre de son côté dans une haine amoureuse, dans une passion malsaine qui le pousse à supprimer Fuyo, à obtenir son corps à défaut de son âme ; mais la décomposition du cadavre, dont le jeune homme s'épuisera à masquer par divers subterfuges les effets visibles, la lui ravira inexorablement.

    Harem, de Charlie Audern et Kaelig Lan Plus personnellement, je recommande ce recueil aux lecteurs qui n'ont jamais lu Edogawa Ranpo et souhaitent le découvrir. Si les deux intrigues mettent en avant le style Ero-guro emblématique de l'auteur nippon, la première est écrite sous la forme d'un conte fantasmagorique et absurde, tandis que la seconde est nettement psychologique et mortelle. Les deux femmes ayant suscité des attentions si extrêmes d'hommes en pâmoison devant leurs beautés, figure de soie figée et actrice de théâtre vaniteuse, glissent pareillement à l'arrière-plan de la scène et laissent leurs admirateurs à leurs fantasmes personnels, aux conséquences de leurs actes désespérés.

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  • Commentaires

    1
    Kaori Koharu Profil de Kaori Koharu
    Dimanche 16 Mai 2010 à 15:40
    Ah ! Trop Kawai ! XD Chuis chez moi ici ! XD Pourquoi t'as pas mis FFIX ? LOL c'est le mien le 9 il est TROP bien !

    Bah je le kiffe tellement que je suis cosplayeuse d, et que mon meilleur cosplay est Grenat Di Alexendros ! MDR

    Allez bisous et... J'ADORE le style de ton blog , c'est génial ! ^^.
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